«De nos jours, les cadres aussi veulent pouvoir concilier responsabilité familiale et activité professionnelle»
Pour vous, qu’est-ce qu’un encadrement moderne et de qualité?
En tant que conseillère d’État, j’assume des responsabilités et je dois prendre des décisions. Au sein de ma direction, je vis au quotidien avec des collègues qui s’identifient à leurs attributions et s’investissent pour atteindre leurs objectifs. Les cadres veillent à ce que les décisions fondamentales soient prises, à ce que les valeurs communes se concrétisent et à ce que les divers efforts soient coordonnés.
La gestion de l’administration est tiraillée entre les directives politiques et les exigences des entreprises. Comment gérez-vous ces tensions?
L’action de l’État sert l’ensemble de la population. Nous ne pouvons pas nous limiter à «une certaine clientèle». La fonction d’équilibrage de l’État est un facteur de réussite de la Suisse. Nous devons travailler avec beaucoup de décideurs et décideuses, que ce soit à cause de notre structure d’État fédéral (Confédération, cantons et communes), ou de la séparation des pouvoirs (parlement, gouvernement et administration). Mais il y a beaucoup de points communs entre les directives politiques et les exigences des entreprises. Pour les entreprises aussi, il est important que les destinataires soient satisfaits, car elles non plus ne disposent de ressources illimitées et doivent utiliser leurs moyens pour servir un objectif. Si une entreprise veut avoir du succès à long terme, elle doit aussi planifier à long terme.
La proportion de femmes cadres supérieures du secteur public (20%) est deux fois plus élevée que dans l’économie privée. A quels facteurs le secteur public doit-il son rôle de pionnier en matière de diversité des genres?
Il n’y a de bien que celui qu’on fait. A Fribourg, nous avons mis au point un «Plan pour l’égalité de l’homme et de la femme dans l’administration cantonale». L’État de Fribourg intègre la thématique de l’égalité à son programme de promotion de la relève et veut utiliser des modèles de temps de travail flexibles. Ma direction est ouverte à des postes à temps partiel, même pour des postes de cadres. Ce profil de poste nous rend attractifs pour les femmes compétentes.
Vous avez nommé l’an dernier deux nouvelles Secrétaires générales de la Direction de la santé et des affaires sociales (DSAS), qui se partagent le poste en job sharing. Quels sont les avantages de ce modèle et quelles difficultés présente-t-il?
Le job sharing suppose une forte personnalité, avec des compétences développées en matière de communication et de travail en équipe. Quand la collaboration fonctionne, nous avons une situation où tout le monde gagne. Grâce à ces profils complémentaires, ma direction a développé son savoir-faire. Nous trouvons des solutions plus créatives, car nous intégrons plus d’idées et de réflexions. Sans compter que de nos jours, les cadres aussi veulent pouvoir concilier responsabilité familiale et activité professionnelle.
Quelles opportunités offrent les missions de l’administration publique, qui seraient attractives pour les cadres de l’économie privée, bien qu’elles soient en général trop peu exploitées?
L’administration publique propose beaucoup d’opportunités et de défis: des missions utiles au service de la population, missions d’importance régionale, suprarégionale ou nationale, missions délicates dans un contexte politique complexe; mais il s’agit souvent de négocier des solutions pragmatiques avec les partenaires (pour trouver un consensus), avec d’importantes responsabilités, car les moyens publics sont investis et que la population est directement concernée, à la fois comme bénéficiaire de projets publics et comme donneuse d’ordre; enfin c’est un travail qui touche de nombreux réseaux et permet des échanges interdisciplinaires. Je suis persuadée que beaucoup de cadres peuvent trouver satisfaction dans l’administration publique.